Mardi soir 1er décembre, devait se tenir à Alpexpo (Grenoble), un débat sur les nanotechnologies, dans le cadre du Grand Débat National qui se déroule actuellement. Mais, si on a bien eu le temps de brancher les micros, les nanos ont été très rapidement déboutées, le débat annulé, nanifié par la maxi contestation d'un groupe d'opposants. A croire certains commentaires de cet événement, les méchants qui auraient organisé ce coup de force, seraient de la mouvance anarcho-écolo, voire, ultra gauche de Carnac : les adeptes d'un nouveau fascisme obscurantiste. Une minorité d'activistes qui auraient pour unique horizon un retour au moyen âge. D'après Pièces et Main d'Oeuvre qui est une composante de cette méchanceté, le rejet du débat national et de toute discussion sur le sujet, est parfaitement assumé. Ils estiment que les questions ne doivent pas porter seulement sur les risques (à prendre ou à ne pas prendre) liés à ces nouvelles technologies, mais surtout sur la viabilité du monde, de l'avenir, qu'elles vont contribuer à fabriquer. Ils sont très clairs, de ce monde-là, ils n'en veulent pas et ce, quelles que soient les précautions prises dans le cadre de l'exploitation des nanotechnologies.
Les gentils, les organisateurs du débat, les supporters des sciences et techniques, mettent plutôt en avant, les enjeux économiques, la croissance et les emplois induits par ce type de développement, comme le potentiel d'innovation, par exemple pour la médecine. Mais dans le même temps, cette communication positive a du mal à canaliser, voire à ne pas revendiquer aussi, d'autres projets d'applications des nanotechnologies qui ne soulèvent pas forcément l'enthousiasme général. Par exemple, la mise au point d'une peinture sur laquelle les jeunes ne peuvent pas taguer ou grapher (ça s'efface), n'est une formidable avancée pour la propreté urbaine, que si les tagueurs ne s'en servent pas en premier (à moins que de réserver l'usage de ces nouveaux matériaux à certains, mais à qui et pourquoi ?). Au delà de cet exemple un peu trivial, les projets décomplexés, et de plus en plus décomplexés, relatifs à la surveillance (ou au contrôle) des personnes, ceux qui existent déjà, et ceux qui sont envisagés, génèrent évidemment des inquiétudes relatives au devenir des libertés publiques. S'il est séduisant de penser que l'intrusion de infiniment petit dans tous les recoins de la vie quotidienne peut nous aider à résoudre tous nos problèmes, il est aussi réaliste de craindre que le problème des uns soit parfois tout simplement posé par les autres, et vice versa. Et ceux qui ne jouent pas le jeu, ceux qui refusent, ceux qui ont des choses à cacher, ceux qui ne sont pas dans la norme, ceux qui ne font pas partie du plus grand nombre n'ont guère envie de se retrouver nano-technologiquement stigmatisés. Peut-être que le débat public avait justement vocation d'envisager la manière dont ces nouveaux usages devront être socialement et politiquement encadrés et régulés. Assurément, les supporters des nanotechnologies ne souhaitent pas plus que d'autres assister à des dérives totalitaires.
Les "ni gentils ni méchants", les gens, attendent et comptent les points. Ils constatent que les budgets consacrés aux nanotechnologies sont colossaux, mais qu'on les dit encore insuffisants. Ils constatent que ces budgets ne sont plus affectés à d'autres activités (ringardes, plus rentables ou laissées en friche). Ils constatent qu'au vu des enjeux stratégiques et économiques, ils ne comptent pas pour grand chose. Ils constatent que "les impératifs d'un système", quel qu'il soit, économique, industriel, ou autre, s'imposent à eux, sans qu'ils n'aient vraiment d'autres choix que d'accepter et de s'adapter. Finalement ils ne pensent pas grand chose des nanotechnologies : un bon plan pour trouver du boulot ? Pour dynamiser l'économie locale ? Pour la fierté d'être toujours meilleur que les Chinois ou que les terroristes ? Pour que des privilégiés deviennent immortels, sur-puissants, ou pour que des spécimens de l'espèce humaine puissent fuir sur Mars et échapper à une catastrophe climatique, nucléaire ou technologique ? De ce monde-là, ils en veulent bien, mais que si on ne peut vraiment pas faire autrement !
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